Analyse effectuée par les membres du Sénat Jean-Yves Leconte et Hélène Conway Mouret
Ce qu’écrit le Président : | La réalité des faits : |
La crise sanitaire
“Dès mars 2020 j’ai demandé au Gouvernement d’organiser le rapatriement de nos compatriotes de passage à l’étranger” | Le rapatriement n’a concerné que les Français momentanément à l’étranger. Ceux qui vivaient à l’étranger étaient priés de “rester chez eux”, contrairement au discours présidentiel de mars 2020. Il a fallu intervenir souvent pour que puissent être rapatriées des personnes résidant à l’étranger et qui avaient un besoin impérieux de revenir en France. |
“J’ai décidé d’un plan de 220 millions d’Euros pour vous accompagner” | Emmanuel Macron confond subvention et autorisation d’emprunt. Sur ce montant annoncé, 50 M€ sont une autorisation d’emprunt auprès de France Trésor donnée à l’AEFE. |
“Un accompagnement social a été prévu” | Il a fallu nous battre pour obtenir la suppression du délai de carence pour accéder à l’assurance maladie lors des retours en France. Aujourd’hui encore, depuis le 1er avril nous n’avons aucune assurance sur la poursuite de cette mesure. |
Rien n’a été entrepris, malgré nos demandes pour accompagner provisoirement ceux qui ne pouvaient plus cotiser à la Caisse des Français de l’étranger. | |
Compte-tenu des conditions mises à l’octroi des aides financières annoncées en avril et votées par le Parlement en juillet 2020, seuls 10% du budget étaient consommés en fin d’année 2020, malgré les besoins et nos alertes sur cette importante question. | |
L’attribution de nombreuses subventions a été faite par l’administration vers des associations qui avaient remis des propositions d’intervention sans appel à projet, sans transparence sur la procédure de décision et sans partage préalable d’une instruction claire sur les critères à respecter pour avoir la possibilité d’être retenu. |
L’administration consulaire
“Améliorer le service qui vous est rendu” | La mise en place d’un service en ligne est bien entendu souhaitable, mais pas lorsqu’elle n’est qu’un prétexte pour réduire les moyens humains et financiers des consulats. De nombreuses compétences des consulats sont progressivement transférées à Nantes, ce qui rend plus difficile la connaissance de la communauté française par nos consulats sur le terrain. Et que dire d’un accueil téléphonique commun aux Français de Chine, Madagascar ou du Canada, plutôt que de maintenir la possibilité de joindre nos consulats en cas d’urgence ? (Il est vrai que ces permanences téléphoniques sont de plus en plus difficiles à tenir avec la baisse des effectifs dans les ambassades). Cette déconnection entre les Français et les consulats engendre une baisse des inscriptions des Français au registre consulaire. |
Les fermetures au public de consulats en raison du risque de contamination ou de contamination à la Covid-19 n’ont même pas permis de faire évoluer les conditions de demande et remise des passeports vers des conditions proches de celles de nos partenaires européens (c’est à dire pas de comparution obligatoire lorsque les empreintes ont déjà été prises, retour du passeport par coursier). Conséquence : de nombreux Français à l’étranger sont sans passeport valide. | |
De nombreuses annonces sur la délivrance de laisser-passer dans le cadre de #Loveisnottourism ou pour des étrangers ayant un besoin impérieux de venir en France n’ont pu être suivies d’effet, faute d’instruction précise donnée aux postes consulaires sur la manière de traiter les annonces ministérielles, malgré des demandes de justificatifs parfois très intrusives dans la vie privée. |
L’éducation
“Ma seconde ambition est éducative” | Nous nous réjouissons que le Président de la République souhaite doubler le réseau d’enseignement français à l’étranger. Mais il faut alors y mettre un minimum de moyens. |
Entre l’élection d’Emmanuel Macron et aujourd’hui, le plafond d’emploi des enseignants titulaires expatriés a diminué de 20% (1093 à 872) et celui des enseignants résidents de 7% (4895 à 4549). | |
Vouloir accueillir deux fois plus d’élèves en 2030 qu’en 2020 en baissant le nombre d’enseignants titulaires est un défi pour le maintien de la qualité de l’enseignement. | |
Pourquoi avoir cassé le système de garantie de l’Etat pour les projets immobiliers en 2018 pour en proposer un nouveau, trois ans plus tard, avec des conditions moins favorables et plus coûteuses pour les établissements -et donc pour les familles- ? | |
Nous n’avons rien contre l’arrivée d’établissements privés; toutefois nous sommes inquiets lorsque ceux-ci se développent au détriment des établissements gérés par l’AEFE ou conventionnés qui ne disposent pas des moyens financiers d’agir et se voient imposer de nouvelles contraintes. | |
La politique de bourses scolaires, l’insuffisance de ses barèmes, conduisent de plus en plus de Français à sortir du réseau de l’enseignement français à l’étranger. Nous voulons une amélioration du barème et des conditions d’examen des bourses scolaires ; elles doivent être conformes au RGPD.En 2020, 6000 des 8000 départs du réseau furent le fait d’élèves français. Peut-on envisager un doublement des effectifs du réseau si les Français n’ont pas les moyens de s’y inscrire ? | |
“Je soutiens également…” | Que veut dire “je soutiens” lorsqu’en s’appuyant sur un développement exclusivement privé du réseau, une concurrence est progressivement construite entre les établissements qui n’y appartiendront pas ? |
Que veut dire “soutenir” si la première action d’Emmanuel Macron, en 2017, a été de réduire le budget de l’AEFE de 33 millions, ce qui a conduit à plus faire payer les familles ? |
“Une grande ambition démocratique”
“Une grande ambition démocratique” | En 2020, malgré leurs efforts et leur mobilisation dans la crise sanitaire, les élus n’ont pu participer correctement à l’élaboration des politiques publiques qui nous concernent. Les réunions organisées à distance limitant la capacité d’accès aux documents administratifs, étant souvent le prétexte à cette évolution. Plus que jamais le pouvoir a été aux mains de l’administration, le gouvernement ne s’assurant pas des effets de ses décisions et les élus de terrain étant “confinés” à un rôle d’auditoire sans capacité d’influencer les décisions. |
A un mois de l’élection consulaire, nous ne savons pas comment seront traitées les circonscriptions où l’élection ne pourra avoir lieu pour des raisons sanitaires. | |
L’attribution des subventions STAFE (Soutien au Tissu Associatif des Français de l’étranger) a été entièrement revue sans préavis et transparence, en 2021, par l’administration qui a imposé de nouvelles conditions d’attribution, en dépit de l’avis de nombreux conseils consulaires |
La stratégie vaccinale
“Vous avez toute votre place dans la stratégie vaccinale que nous avons élaborée” | Nous interrogeons sans relâche le gouvernement sur le sujet de la vaccination à l’étranger depuis novembre 2020. Encore aujourd’hui, nous n’avons encore aucune réponse concrète sur les pays et les personnes qui pourraient y avoir droit et à quelle échéance. |
“Ceux qui le souhaitent pourraient se faire vacciner à l’occasion de leur venue en France dans le respect des priorité que nous nous sommes fixés” | Merci au Conseil d’Etat d’avoir supprimé les motifs impérieux pour rentrer en France ! Une fois arrivés en France, merci au Président de nous annoncer qu’il ne fera plus de discrimination avec les résidents ! |
Ce que le Président n’écrit pas :
sur la fiscalité | Nous avons du nous battre plus d’une année pour que le gouvernement renonce à une réforme fiscale de la retenue à la source qui aurait significativement augmenté l’imposition d’un nombre important de Français. |
Un prélèvement de solidarité de 7% a été mis en place lorsque le gouvernement a du se conformer aux règles européennes en matière de prélèvement de la CSG/CRDS. | |
Le gouvernement ne défend pas correctement les fonctionnaires touchés par des atteintes aux conventions de non double imposition dans leur pays de résidence. |
sur les pensionnés vivant à l’étranger | La mise en place de la mutualisation des certificats de vie a été particulièrement chaotique et réalisée sans concertation préalable avec les élus. les conditions sanitaires des pays de résidence ne sont plus prises en compte par Union retraite dans le cadre des demandes de certificat d’existence. Ceux-ci, lorsqu’ils sont envoyés par voie postale, sont parfois traités avec beaucoup d’attente. De nombreux retraités ont vu, dans ces conditions, le versement de leur retraite suspendu. |
Les pensionnés français vivant à l’étranger et n’ayant pas cotisé un minimum de 15 ans en France se voient couper le droit à la prise en charge de leurs frais médicaux lors de leurs séjours en France (disposition de la loi de finances de la sécurité sociale pour 2019, inspirée par le rapport d’Anne Genetet et mise en place progressivement par l’Assurance maladie). |
sur les discriminations envers les Français installés à l’étranger et de leur famille décidées par le gouvernement | C’est le Conseil d’Etat qui a dû rétablir le droit des Français vivant hors de l’Union Européenne à revenir en France, même sans motif impérieux (mais en respectant les protocoles sanitaires). Le gouvernement avait imposé ces motifs impérieux par décret fin janvier 2021. |
C’est le Conseil d’Etat qui a rétabli le droit à un Français de se marier en France, avec un.e étranger.e. ayant besoin d’un visa pour se rendre en France. Le gouvernement avait en effet stoppé les délivrances de visa pour mariage. |
sur l’absence de soutien à la présence de la France à l’international et aux entrepreneurs français installés à l’étranger | Le gouvernement n’a jamais pris au sérieux les propositions d’accompagnement des structures représentant les intérêts économiques de la France à l’étranger comme les CCI dont certaines sont aujourd’hui en grande difficulté. De nombreuses propositions avaient pourtant été formulées pour que les entreprises et structures participant à la présence de la France à l’étranger puissent être accompagnées, même lorsqu’elles étaient de droit local. |
Aucun plan n’a été mis en œuvre pour aider les auto-entrepreneurs et les entreprises crées par des Français à l’étranger. Nombre de ces acteurs se retrouvent en situation dramatique et contraints à un retour vers la France. Seules certaines initiatives locales, grâce à l’appui des conseillers des Français de l’étranger, parviennent à répondre à leur besoins. |